Intérêt et usage de l'observation de la Terre pour promouvoir une hydro-diplomatie de la gestion transfrontalière des ressources en eau: Exemple de la CICOS en Afrique centrale
La forêt et l’eau dominent le bassin guinéo-congolais, avec ses 3,7 millions de km² de forêts et le fleuve Congo débitant 41 000 m³/s annuellement. Ces écosystèmes interconnectés sont gérés par la CICOS via des projets comme GERNAC, utilisant des technologies d'observation de la Terre
Le contexte
La forêt et l’eau sont les 2 ressources naturelles qui en impose le plus lorsque l’on arrive dans le bassin guinéo congolais. Avec près de 3,7 millions de kilomètres carrés, le bloc forestier guinéo-congolais est la deuxième plus grande région forestière tropicale au monde, après l'Amazonie. Le débit moyen annuel du fleuve Congo quant à lui est estimé à environ 41 000 mètres cubes par seconde, soit la 2e position derrière l’Amazone mais devant d'autres grands fleuves comme le Yangtsé, le Mississipi et le Nil.
Ces 2 écosystèmes ont des fonctionnements très interdépendants. Ce qui explique pourquoi la Commission Internationale du Bassin Congo-Oubangui-Sangha (CICOS) adresse les 2 questions en parallèle dans le projet supporté par GMES et l’Afrique dans cette région (GERNAC), via un offre en service qui fasse appel aux technologies d’observation de la Terre et qui se décline par thématique. Ses activités visent à sensibiliser les usagers, les décideurs, les scientifiques, et à développer les usages en aval des informations qu’elle produit. Ci-après quelques exemples d’activités récentes.
Premier exemple, l’Organisation de la Journée Mondiale de l’Eau
A l'occasion de la célébration de la Journée Mondiale de l'Eau (JME) le 22 mars 2024, le CREBBaC a organisé une conférence autour du thème "Promouvoir l'investissement et l'entreprenariat dans le secteur de l'Eau en RDC". CREBBAC est l'acronyme de "Centre Régional de l'Eau du Bassin du Congo". Ce centre, une initiative nationale appuyée par des partenaires internationaux comme l’USAID, la GIZ et le DFID a été créé en 2014. Il vise à renforcer la gestion intégrée des ressources en eau dans le bassin du Congo en fournissant des services techniques, des formations, des recherches et des études dans le domaine de l'eau.
Pour le Directeur de l'Ecole Régionale de l'Eau et du CREBBaC, le Professeur Raphaël Tshimanga Mwamba, la RDC est une puissance hydrologique qui se méconnait largement. Pour résoudre cette situation il faut continuer et accélérer les investissements dans la formation, le renforcement de capacités et les opportunités économiques.
Deux étudiants boursiers du programme GMES and Africa du consortium CICOS, ont donc présenté quelques résultats obtenus dans le cadre de leurs travaux de recherche. Le premier s’appelle Djamel KECHNIT, un doctorant qui travaille sur le développement d'un modèle hydrodynamique 2D le long des 1740 km entre Kinshasa et Kisangani. Le modèle sert à produire les cartes de navigation, à base de données in situ et de données satellitaires et il est en phase de calibration et validation.
Le deuxième étudiant s’appelle Henock NGOYI. Son Master porte sur le NexusEau-Irrigation- Sécurité alimentaire. Via une étude de l'estimation des besoins en eau des cultures, il montre que le changement climatique va impacter ceux-ci et qu’ils vont augmenter. Il montre également que la recherche de technologies innovantes pour les systèmes d'irrigation, par exemple en intégrant des données satellitaires, doit être une priorité pour assurer la sécurité alimentaire d'une population en croissante augmentation.
Autres liens
- https://actualite.cd/2024/03/23/jme-2024-la-rdc-doit-investir-dans-toutes-les-opportunites-daffaires-quoffre-son
- https://youtu.be/GkqaS5gXlNE?si=iSFI0i9InLv0Ri1P
- https://youtu.be/ORw9XuU1vuw
Deuxième exemple d’activité, la participation de la CICOS/GERNAC à un atelier organisé du 19 au 21 mars 2024 par EUMETSAT à Darmstadt en Allemagne sur la prise en compte des données issues du spatial pour l’hydrologie opérationnelle et la Gestion des ressources en eau en Afrique.
EUMETSAT, l'Organisation Européenne pour l'Exploitation des Satellites Météorologiques, fournit des données et des services météorologiques et climatiques à ses États membres et à la communauté internationale. Elle exploite une série de satellites météorologiques et fournit des observations de la Terre depuis l'espace, ce qui est essentiel pour la surveillance et la prévision météorologique, la surveillance climatique, la gestion des catastrophes naturelles et de nombreuses autres applications. Elle appuie depuis de longues années les échanges sur l'utilisation des données d'observation de la Terre et la gestion des bassins en Afrique. Elle a convié la CICOS – le Secrétaire Général et le Directeur des Ressources en Eau (DRE)- à prendre part à cet atelier.
Un Webinaire sur l'hydrologie en Afrique avait eu lieu précédemment le 24 août 2023. L’atelier de Darmstadt visait quant à lui à faire progresser les discussions et les collaborations initiées lors de ce Webinaire et à offrir un cadre d'échange entre les fournisseurs de données d'Observation de la Terre et les Institutions africaines utilisatrices pour les applications hydrologiques en Afrique.
Comme organisme de bassin, la CICOS a été mise au centre des actions à venir dans le cadre de la coopération entre l'Union Africaine et l'Union Européenne pour l'utilisation des données d'observation de la Terre dans la gestion des ressources en eau, à travers le programme GMES et l’Afrique.
Lien: https://www.eumetsat.int/role-earth-observation-data-hydrology-africa
Troisième exemple, le renforcement des capacités des organismes de Bassins Transfrontaliers (OBT) sur l’allocation des ressources eau transfrontalières.
Organisé du 15 au 16 avril 2024 à Livingstone en Zambie, par le Secrétariat de la Convention de Nations Unies sur l'Eau (UNECE) avec le soutien du Gouvernement de la Finlande, de la Zambie, l'UNECA, l'UE et d'autres partenaires, cet atelier portait sur l'allocation des eaux transfrontalières, les liens étroits et interdépendants entre quatre domaines critiques du développement durable c’est-à-dire l’Eau, l’énergie, l’alimentation, les écosystèmes, qui se résument dans un terme, le Nexus WEFE ou simplement Nexus. Il visait le partage des leçons apprises, de bonnes pratiques, et des outils pratiques y relatifs.
La CICOS a donc partagé son expérience sur l’usage des données spatiales dans l’amélioration des modèles d’allocation des ressources en eau transfrontalières en présentant le projet GMES/GERNAC comme le cadre d’acquisition de ces données mais aussi de renforcement des capacités des acteurs pour l’alimentation des systèmes d’information hydrologiques.
Lien: https://unece.org/info/events/event/388683
Dernier exemple, la participation de la CICOS à l’atelier du Réseau Africain des Organisme de Bassin (RAOB) pour la préparation 10ème Forum Mondial de l'Eau, du 18 au 25 mai 2024 à Bali en Indonésie
Ainsi que nous l’expliquions au début de l’article, la cuvette guinéo congolaise est le deuxième château d'eau du monde. Dans la perspective de sa participation à ce forum, la CICOS était invitée à un atelier de formation sur l'hydro-diplomatie pour la gestion des ressources en eau transfrontalières. Cet atelier était organisé à Dakar au Sénégal par le RAOB dans le cadre du projet DYNOBA. Le cadre institutionnel et juridique, notamment l'organigramme et les missions de la CICOS, ont été présentés ainsi que les documents de planification stratégiques que sont le Schéma Directeur d'Aménagement et de Gestion des Eaux (SDAGE) et le Plan d'Action Stratégique pour la promotion de la navigation Intérieure (PAS-Navigation).Le RAOB promeut la gestion intégrée et durable des ressources en eau à travers la coopération, le renforcement des capacités, la recherche, le plaidoyer et la gestion des données. Il vise à assurer que les ressources en eau sont gérées de manière à soutenir le développement économique, social et environnemental des pays africains.
Le projet DYNOBA, financé par l'Agence Française de Développement (AFD) et la coopération suisse, est une initiative visant à améliorer la gestion et la gouvernance des ressources en eau dans le bassin du fleuve Congo. DYNOBA signifie "Dynamique des Organismes de Bassin Africains". Le projet se concentre principalement sur le renforcement des capacités des organismes de bassin et des institutions impliquées dans la gestion des ressources en eau.
Cet atelier a donné suite du 26 au 27 Avril 2024 à un autre atelier de préparation du Forum de Bali, qui s’est tenu au siège de l’Organisation pour la Mise en Valeur du fleuve Sénégal (OMVS), également siège du secrétariat Technique du RAOB.
La CICOS se rendait au Forum Mondial de l'Eau pour partager sa riche expérience et les bonnes pratiques qu’elle met en œuvre en matière d'utilisation des données d'Observation de la Terre dans la gestion de l'eau et des ressources naturelles du bassin du Congo. Cette expérience cumulée a été rendue possible grâce aux différents programmes financés dans le cadre du Partenariat Union Européenne – Union Africaine depuis 2008. Il s’agit notamment de Programmes tels que AMESD (2007-2013), MESA (2013-2018) et GMES et l’Afrique (2017-) mais aussi de TIGER (2002-2016)
AMESD signifie "African Monitoring of the Environment for Sustainable Development" (Surveillance de l'Environnement en Afrique pour un Développement Durable). Il s'agit d'un programme qui visait à renforcer les capacités des pays africains à surveiller l'environnement et à gérer les ressources naturelles de manière durable à l'aide de données et de technologies satellitaires.
AMESD a été suivi par le programme MESA (Monitoring for Environment and Security in Africa), qui a continué les efforts pour renforcer les capacités de surveillance environnementale en Afrique en utilisant des données satellitaires et en élargissant le champ d'application pour inclure la sécurité environnementale.
Le programme TIGER de l'Agence Spatiale Européenne (ESA) est quant à lui une initiative lancée pour répondre aux défis de la gestion des ressources en eau en Afrique, en utilisant les technologies de télédétection par satellite. Il s'inscrit dans le cadre des efforts de l'ESA pour soutenir les objectifs du Plan d'Action de Johannesburg issu du Sommet Mondial pour le Développement Durable en 2002.
Les programmes sus cités, ont contribué à améliorer la capacité des pays africains à surveiller leur environnement et à gérer leurs ressources naturelles de manière plus efficace et durable, en mettant l'accent sur l'utilisation de la télédétection et des technologies satellitaires pour fournir des informations critiques et actualisées.
Lien: https://www.oieau.org/actualites/dynoba-atelier-regional-sur-l-hydro-diplomatie-et-la-gouvernance-des-eaux-tranfrontalieres-en-afrique-de-l-ouest-et-centrale
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